Passez à la couleur!
Au club, nous sommes parfois contraints d’utiliser des documents d’époque en noir et blanc pour illustrer nos films. Voici comment s’en sortir avec brio. Ce dernier tutoriel va vous décoiffer…
La colorisation des photos est une technique ancienne très utilisée au début du XXe siècle (une autre époque). Bien entendu, on colorait à la main: aussi bien les cartes postales que les films…
Les techniques de colorisation ont évolué au cours du XXe siècle. Des films N&B ont été coloriés. C’était une mode dans les années 1990. Les logiciels étaient assez lourds et réservés aux professionnels. Les choses ont bien évoluées ces dernières années.
Bien entendu, il y a des logiciels qui vous permettent de colorier vos images manuellement mais avec la technologie de l’intelligence artificielle, vous pouvez aller très loin. Sans doute au delà de vos espérances. La vidéo ci-dessous va vous montrer que mettre de la couleur dans vos anciennes photos ne relève plus de la science-fiction.
Voilà, vous savez comment maintenant comment colorier vos photos. Les sites utilisés dans la vidéos sont les suivants:
- https://demos.algorithmia.com/colorize-photos
- https://www.myheritage.fr/incolor/: basé sur le logiciel de référence DeOldify.
- https://colorize.cc/: 3 images seulement…
- https://deepai.org/machine-learning-model/colorizer
- https://colourise.sg/
Pour ceux qui seraient intéressé par le logiciel d’Avanquest pour coloriser les anciennes photos, vous pouvez en trouver une description et une vidéo explicative sur cette page. Le logiciel Photoshop Elements semble être des rares logiciels Adobe qui ne nécessite pas d’abonnement.
Introduction à l’Intelligence Artificielle
Je voudrais aller un peu plus loin dans l’intelligence artificielle appliquée au traitement des images. Le traitement d’image est un pan complet de l’IA (Intelligence Artificielle). On peut aujourd’hui reconnaître énormément d’objets via l’IA. Pour cela, on utilise de puissants algorithmes afin de « standardiser » l’image. C’est ainsi que l’on peut reconnaître le ciel, la mer, les arbres, les animaux, les personnages, etc. Grâce à cela, il suffit d’appliquer les bonnes couleurs.
Il faut savoir que l’œil humain étant plus sensible à la lumière qu’aux couleurs, il est donc relativement aisé de coloriser des images. Comme l’apprentissage de l’IA s’effectue via l’analyse de millions d’images, on peut obtenir une bonne capacité de choix pour les couleurs. On remarquera cependant que la plupart des costumes sont coloriés en bleu nuit. Il y a comme cela des artéfacts qui permettent de se douter que le film a été coloré par l’ordinateur.
Les technologies d’analyse des images sont redoutables car aujourd’hui, dans le domaine médical, l’IA est utilisée sur les photographies des grains de beauté pour permettre de déterminer s’ils sont cancéreux ou pas. Et le taux de réussite est assez époustouflant, allant même au-delà des résultats obtenus par des médecins.
Mais pour obtenir de bons résultats, l’IA doit apprendre. Pour cela, on lui a donné des images en couleurs pour lui permettre de savoir comment une image doit être colorisée. Après cet apprentissage, l’IA va deviner quelle est la bonne couleur et sur quelle zone de l’image il faut l’appliquer. Pour cela, il y a un risque d’erreur qui est calculable. Par ailleurs, les IA n’appliquent que rarement des couleurs vives, préférant se contenter de couleurs pastels. Bien que je ne connaisse pas les algorithmes utilisés, je suppose que plus l’incertitude est grande, plus la couleur se rapprochera du pastel (c’est une bonne méthode pour cacher l’incompétence du logiciel).
La colorisation peut donc être erronée mais en général, l’IA s’en sort pas mal et rapidement selon l’équipement dont on dispose (pour colorier 5 minutes de film, il m’a fallu environ 1 heure de calcul).
Où trouver le logiciel?
Le plus simple est d’utiliser une IA déjà entraînée et, encore plus simplement, l’un des sites Web que j’ai cité.
Le site WEB « MyHeritage » utilise une technologie open source dont vous pourrez trouver le code source ici: https://github.com/jantic/DeOldify (pour les plus techniques d’entre vous). C’est avec ce logiciel que j’ai effectué la colorisation des deux films donnés en exemple (que vous retrouvez plus bas dans cet article).
Si j’ai découvert le film de Fritz Lang grâce à la version mise en couleur par Giorgio Moroder en 1984, je ne tenterai pas de colorier chaque image d’un film manuellement. Si, à l’époque, cela était la seule solution, le compositeur (devenu réalisateur pour l’occasion) a colorié par plan (1 à 2 couleurs seulement sur chaque plan); il s’agit donc davantage de pousser le sentiment voulu par le réalisateur (à travers les couleurs chaudes et les couleurs froides) que relever le défi d’une colorisation complète.
Pour mes tests de colorisation, j’ai utilisé 2 films. Tout d’abord la bande annonce du film de Jean Renoir « La règle du jeu » à partir d’une vidéo que j’ai trouvé sur Youtube:
J’ai appliqué le logiciel de colorisation directement (il n’y a aucun réglage à effectuer) et le résultat a été le suivant:
Comme vous pouvez le remarquer, les scènes comportant des personnages et prises à l’extérieur sont particulièrement bluffantes de réalité. Il faut comprendre que pour arriver à de tels résultats, il a fallut entraîner l’intelligence artificielle à reconnaître les visages, les habits, les arbres (la nature), le ciel, la mer, etc.
Et il faut également comprendre que plus l’image est de qualité, plus il est facile de reconnaître les choses. C’est pourquoi la vidéo de Raymond Brussino « Paris Panhard 1957 » a donné une colorisation de moins bonne qualité. Voici la vidéo d’origine:
Et la version colorisée:
Pourquoi le résultat est moins bon? Comme je l’ai dit dans la vidéo, les images sont parfois un peu saturée et parfois un peu floues. Il ne faut pas s’y méprendre, loin de moi l’idée de critiquer un ami d’autant plus que certaines scènes n’ont sans doute pas été simples à filmer.
Mais il faut comprendre que l’IA est d’autant plus efficace que l’image est nette afin de permettre un bon découpage des objets et de découvrir ceux-ci. Plus le film original sera de qualité (en termes de netteté et de spectre lumineux), plus l’IA aura des chances de distinguer les objets ou les personnages.
J’ai aussi omis de supprimer les bandes noires sur le coté de l’image ce qui doit aussi poser quelques soucis à l’IA.
Certains plans du film sont aussi beaucoup plus difficiles à interpréter que ceux utilisés dans la bande annonce. La circulation des Champs-Elysées prise en hauteur peut déstabiliser la reconnaissance. Idem avec les nombreuses voitures qui défilent. On pourrait améliorer les résultats en effectuant un apprentissage plus ciblés avec, par exemple, de nombreuses photos de Paris. Et en ajoutant volontairement des photos de véhicules de l’époque afin de biaiser l’apprentissage et faciliter la coloration. Mais l’entraînement peut être très long et il faut veiller à ce qu’il reste passablement neutre; sinon on peut tomber dans l’excès où l’IA apprends « par cœeur » ce qui donne aussi de mauvais résultats.
Il n’en reste pas moins que les essais tels que je les ai effectués en ligne (et assez rapidement en suivant les instructions) donnent une bonne idée des capacités qui sont aujourd’hui à notre disposition.
Pour aller plus loin…
Si vous êtes curieux et désirez aller plus loin, je vous conseille le visionnage de cette vidéo avec 25 fantastiques colorisations. Ne me demandez pas quels outils ont été utilisés mais j’émets l’hypothèse que les artistes ont tout d’abord utilisé l’IA puis ont adapté et amélioré le résultat avec des logiciels de retouche.
Une dernière astuce: souvent, dans les films de fiction, on cherche pendant pas mal de temps le bon filtre pour montrer un rêve ou un flashback. La colorisation peut-être une bonne technique pour remplacer les filtres offerts par le logiciel de montage. Comme quoi, l’IA peut aller encore plus loin que la simple colorisation!